« Ainsi soient-ils » : une série d’Arte met la question
de la vocation, de la foi et de l’Église sur la place publique
NOTE D’ANALYSE
Cette fiction démarre ce soir 11 octobre sur Arte (8 épisodes de 52’) et prend pour cadre la vie de l’Église catholique. Particulièrement celle d’un séminaire à travers 5 figures de séminaristes, jeunes divers et bien de leur temps. Sont aussi mis en scène différents aspects institutionnels de la vie de l’Église : la Conférence des Évêques, le Vatican et une paroisse. On y découvre le cheminement hésitant et souvent torturé de jeunes qui discernent leur vocation mais aussi les rapports conflictuels au sein des responsables hiérarchiques de l’Église de France et du Vatican.
L’écriture d’une série demande de mettre les téléspectateurs dans le désir de voir la suite des épisodes. Ils sont écrits dans ce sens, la fin du huitième épisode appelle déjà la saison 2. Se déploie donc une tension dramatique avec des intrigues qui tournent autour des trois sujets habituels: l’argent, le sexe et le pouvoir, ce qui n’est pas sans rappeler les 3 conseils évangéliques (pauvreté, chasteté, obéissance). La série montre comment les différents personnages se débattent avec ces questions qui traversent chacun. En cela, cette série est bien le reflet de notre époque, ce qui n’est pas étonnant car une série est d’abord construite autour d’une typologie de personnages aux traits forcés qui permettent à chaque téléspectateur de s’identifier.
La générosité des 5 jeunes adultes entrants au séminaire est remarquable. Chacun, marqué par son histoire souvent tumultueuse, a le désir de se donner pleinement pour Dieu et pour les autres.
Le monde dépeint par les auteurs de la série est assez désenchanté. La place du péché est très présente. Plusieurs épisodes de la série se déroulent durant l’époque liturgique de l’Avent puis du Carême. Le triptyque culpabilité/péché/pardon est largement exploité. La bande-annonce et les lumières viennent à l’appui des tensions intérieures des personnages et des conflits relationnels.
La série est bien documentée et ce qui est présenté de l’Église peut ou a pu exister. L’un des scénaristes a grandi dans une famille très engagée dans la foi catholique mais se dit athée, l’autre est d’origine juive et ne connaissait pas l’Église. Le conseiller principal est un ancien prêtre passé par le séminaire des Carmes, et tout au long du tournage un jeune prêtre était disponible pour répondre aux questions. On observe un double niveau, la série donne à voir des itinéraires de foi assez justes, des parcours individuels très humains et parfois touchants laissant place à la complexité des questionnements et des sentiments. Elle donne aussi à voir la liturgie de l’Église (liturgie des heures, Eucharisties) et donne à retentir l’écoute de la Parole de Dieu, tout en mettant principalement en avant les homélies des pères du séminaire. Les scènes autour du sacrement de réconciliation sont assez intéressantes. Mais sur un autre niveau qui touche davantage l’institution ce qui est décrit de la Conférence des Évêques et du Vatican est largement caricaturé, posant d’emblée les relations sur le mode du conflit et mettant en scène l’affrontement entre ces deux pôles que sont « charisme et institution ». Cette série n’est ni un documentaire sur l’Église, ni une présentation de la formation des futurs prêtres. Elle en utilise le cadre dans ses aspects perçus par beaucoup comme secrets et fascinants.
Les personnages de la hiérarchie de l’Église, souvent caricaturaux, sont ambigus et possèdent des profils psychologiques complexes, avec des zones d’ombres et de lumières. Tous sont traversés par des doutes, des attitudes discutables. Ce qui rend l’ensemble des personnages attachants voire attirants.
Ceci dit, cette fiction peut produire des agacements chez certains catholiques qui ne retrouvent pas l’Église dans laquelle ils vivent. (Ici c’est une fiction dramatique dont le cadre est l’Église, et il est important comme pour tout film d’en décrypter les ressorts et l’écriture). Cette série donne aussi l’occasion de témoigner de ce que chacun vit dans l’Église, de la façon dont les candidats au ministère presbytéral sont accompagnés et formés.
En prenant de la distance devant les traits forcés et exagérés de la fiction, la série pose des questions.
Est-ce que l’Église institutionnelle peut répondre à la générosité des jeunes générations qui souhaitent s’engager de tout leur être ?
Qu’est-ce qui peut redonner espérance au cœur de ce monde noir et triste ? La foi peut-elle répondre à cette attente?
La quasi absence de la communauté des chrétiens est remarquable et appelle des échanges.
La solitude du prêtre diocésain en paroisse n’est pas sans interpeller.
La place des femmes demandent aussi quelques commentaires et témoignages. Les différentes figures de religieuses témoignent d’une vision très réductrice! Les questions existentielles qui traversent les séminaristes sont proches des questions qui traversent celles et ceux qui vivent une démarche de discernement, d’engagement et de perspectives de choix radicaux. (Sexualité, homosexualité, vérité, pardon, engagement absolu, remise en cause, rapport à l’argent, place de la famille, obéissance). Là aussi il y a l’occasion de présenter la qualité de formation des séminaristes (voir les vidéos, sites et documents à disposition pour en rendre compte).
Il nous semble donc que cette série dont sans doute beaucoup de jeunes et moins jeunes vont parler peut susciter de nombreuses occasions de témoignages chez les chrétiens dans les conversations du quotidien.
Cela peut donc créer des opportunités pour inviter à découvrir et rencontrer davantage la réalité des séminaires, des cheminements vocationnels, de la vie de l’Église dans l’esprit « vous avez vu la fiction, passez à la réalité « venez et voyez » ». Sans chercher à faire la publicité de cette série qui n’est pas sans proposer une vision en partie caricaturale de certains aspects de la vie de l’Église, nous pensons qu’il est intéressant de se préparer à rebondir sur ce qu’elle va susciter dans un esprit de communication positive sur les questions de vocation et de foi.
P. Didier Noblot et Sr Nathalie Becquart du SNEJV
ELEMENTS DE REVUE DE PRESSE
Le Monde Dimanche 7 – Lundi 8 octobre 2012
Ils ne sont ni flics, ni médecins, ni dealers de drogue, ni ados en mal de sensations fortes ; ils sont pourtant les héros d’une épatante série, l’un des temps forts de cette rentrée télé. […]
Prendre des séminaristes et des religieux et en faire les personnages principaux d’un feuilleton en huit épisodes (8x52 minutes), le pari est osé… […]
Le mystère de la « vocation » fascine, en effet, d’autant plus, aujourd’hui, que la diminution du nombre de prêtres et les modes de vie actuels, davantage caractérisés par des engagements successifs que par les « contrats à vie », rendent quasiment anachronique un tel choix de vie. Moins de cent hommes, jeunes ou moins jeunes, sont ordonnés prêtres chaque année en France.
AFP Dimanche 7 octobre 2012
Qu’est-ce qui pousse de jeunes hommes d’aujourd’hui à devenir séminaristes ? La série d’Arte « Ainsi soient-il » interroge la foi d’aspirants à la prêtrise et plonge le téléspectateurs dans les arcanes de l’Eglise, des paroisses désertées aux intrigues du Vatican. […]
TéléObs Jeudi 11 octobre 2012
Crises de foi : Les mésaventures de cinq aspirants prêtres durant leur première année au séminaire.
Une fiction – et non un documentaire – qui risque de faire parler, voire grincer. […]
Qu’est-ce que l’engagement ? Comment garder son intégrité ? Vivre sa foi en dehors du cocon d’un séminaire ? Porter une parole dans un monde qui manque de spiritualité ? Si ces aspirants prêtres croyaient fuir la vie hors les murs, celle-ci se rappelle à leur bon souvenir : le passé et ses traumatismes qui hantent, les tourments familiaux qu’on ne peut ignorer, les grandes questions de société qui forcent à se positionner forment une trame dramaturgique suffisamment sinueuse pour des scénaristes. […]
« Nous avons touché du doigt, disent-ils, la diversité au même de l’Église. Beaucoup ont accepté de nous parler à tous les niveaux de la hiérarchie. Nous n’avons pu pénétrer aux Carmes (le grand séminaire parisien, NDRL) mais un autre séminaire nous a volontiers accueillis. Une paroisse a refusé de nous laisser tourner pour ne pas cautionner la série – mais, quelques kilomètres plus loin, une autre, après avoir lu le scénario, nous a laissé faire. » […]
Mais, alors, dans cette atmosphère plutôt sombre et sans grande fraternité, une question se pose : pourquoi ces jeunes gens restent-ils ? »
Télérama 3 octobre 2012
« L’Église est un formidable microcosme pour raconter le monde d’aujourd’hui, assure le producteur. Comme tous les corps sociaux ou politique, elle est traversée de débats. A commencer par l’opposition entre la modernité et la tradition. […]
« La société leur renvoie souvent leurs convictions en pleine figure, analyse Bruno Nahon. Nos jeunes aspirants curés vivent les mêmes conflits que tous ceux qui veulent s’engager, qu’ils soient syndicalistes, militants politiques, humanitaires. »
Télé-Loisirs Jeudi 11 octobre 2012
Malgré son thème peu fédérateur, cette nouvelle série d’Arte surprend et accroche. Ces curés, vous allez les vénérez ! […]
RESSOURCES
Films sur les séminaristes
· Documentaire de Véronique Bréchot sur le séminaire de Lille, « Prêt(re) pour se donner » (26’)
http://www.seminaire-lille.fr/
· Documentaire sur le séminaire des Carmes, « Devenir prêtre »(52’)
http://www.sem-carmes.com/?Les-seminaristes-Qui-sont-ils
· Documentaire de Virginie Ledoyen sur le séminaire de Paris, « Au nom du Père » (54’)
http://www.mavocation.org/pretre-diocesain/seminaire-paris/actualites/1335-film-seminaristes.html
Internet
· Site du Service national pour l’évangélisation des jeunes et pour les vocations
http://www.jeunes-vocations.catholique.fr
· Blog jeunes catholiques
http://blog.jeunes-cathos.fr/theme/journal_pretre/
http://blog.jeunes-cathos.fr/theme/journal_religieuse/
Note du Service
National pour l'Evangélisation des Jeunes et les Vocations