Cher Thomas,
Aujourd’hui, c’est ta fête, et j’espère que tu pardonneras ma grande liberté de t’adresser ces quelques lignes alors que tu es plus préoccupé à attendre les résultats des épreuves du baccalauréat. Sache, en toute amitié, que ce qui suit n’a de valeur que par le temps que j’ai pris pour le rédiger, pensant encore souvent à notre partage au mois de janvier, étant encore bien étonné que tu avoues avoir pensé à être prêtre de Jésus-Christ, reconnaissant ton incapacité à croire en sa Présence dans le pain et le vin consacrés.
Tu seras peut-être agacé, dérouté ou bien embêté de lire encore quelques lignes, ce simple témoignage de foi d’un croyant qui veut partager ce qui est au cœur de sa vie, non pour convaincre mais pour exprimer ce qui lui paraît essentiel.
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Je crois au Christ ressuscité, vivant à jamais, vainqueur de la mort, de la souffrance, tant de maux de notre existence, humanité transfigurée. Je crois au Christ vainqueur de la mort sur la croix, qui montre en écartant les bras qu’il veut rassembler tous les hommes, images du Dieu révélé. Sa mort nous dit par quelle vie, il veut nous unir dans sa paix, sans effacer les différences mais mettre en valeur en chacun sa Présence.
Le pain, le vin sont nos offrandes humbles et pauvres, sans intérêt pour Dieu qui sait se passer de nos prières et de nos dons. Il a pourtant voulu compter sur notre amour pour l’annoncer et accepter ces humbles hommages pour révéler la gratuité du don qu’il fait à l’humanité. Le plus beau don, c’est à jamais qu’il nous l’a fait en envoyant le Premier-Né, son Fils unique, pour manifester l’Amour sans fin qu’il veut donner. En agréant ces dons sans gloire, il reconnaît que dans l’histoire, son plus beau don a réveillé en nous le désir insaisissable de goûter Dieu tel qu’il se donne. Ces dons sans valeur, il les transforme en don parfait pour l’unité, repas d’Amour qui nous fera trouver la Paix en lui.
Son Corps livré nous est donné pour rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés, divisés par tant de bagarres, de luttes et d’événements. Il veut que nous soyions son Corps, un Corps vivant de charité, dans l’espérance et la foi que son amour partout vaincra. Son Corps « humain », c’est notre Eglise, vivante par la foi des hommes qui la font vivre par l’Esprit. Elle vit d’amour et de pardon, au travers des turbulences humaines qui défigurent bien souvent son vrai visage de Mère attentive. Mais elle vit par le Corps du Christ, qui irrigue la vie de ses membres et les transforme en Dieu lui-même en visant pour eux l’éternité.
Ce grand mystère de la foi me fait vivre et me donne courage, en pensant que c’est Dieu lui-même qui agit dans mon cœur, par mes bras, le Christ vivant ressuscité reçu dans l’insignifiante hostie. Il est au cœur de toute ma vie. Ce don de Dieu pour tous les hommes doit se poursuivre aujourd’hui, au travers d’humbles mains humaines consacrées dans la liberté.
C’est pour cela que, avec la grâce de Dieu, je suis prêtre : pour donner aux hommes mes frères, cette nourriture sacrée, le pain de la vie éternelle.
Que Thomas, l’incrédule, te soutienne dans cette nouvelle étape de ta vie étudiante. Qu’il t’accompagne pour t’aider à le reconnaître lui « Mon Seigneur et mon Dieu ».
C’est ma prière, c’est ce que je demande pour toi au Seigneur.
Xavier Cormary, prêtre
C’est un non-chrétien (Gandhi) qui a dit :
« Dans un monde où tant de gens ont faim, Dieu ne peut se donner que sous l’apparence du pain »