Curé de 40 clochers dans le nord du Tarn, je suis consterné de constater que bon nombre des églises peu ou pas ouvertes sont visitées ou utilisées sans que j’ai mon mot à dire… Un concert, une visite culturelle, et même parfois, ô surprise, ô joie : des travaux d’entretien! Ces événements sont illégaux dans la mesure où ils ne se déroulent pas avec l’accord du curé ou de son représentant.
Nombreuses sont les municipalités et les associations de sauvegarde qui font un travail remarquable pour entretenir les édifices : il faut le souligner ! Toutefois, une commune, même propriétaire d’une église, même avec les meilleures intentions, n’a pas forcément tous les droits sur cet édifice. Tout comme un propriétaire ne peut pas utiliser ou visiter son appartement à sa guise, quand il a signé un bail avec un locataire.
Souvent par ignorance, les maires pensent qu’une église communale peut être utilisée sans en référer au curé. La loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat et sa jurisprudence sont claires. Les édifices religieux sont pour la plupart affectées au culte catholique (ou protestant pour certains temples). Une église, même peu utilisée, reste affectée tant que le préfet et l’évêque, d’un commun accord, n’ont pas signé sa désaffectation : cette procédure administrative se produit quelques fois lorsque l’église menace ruine ou n’a plus aucune utilisation religieuse possible. Elle demeure actuellement exceptionnelle.
Au-delà de la responsabilité des maires qui ignorent souvent les modalités pour appliquer la loi : je voudrais souligner un fait qui est une réalité : bon nombre d’églises de campagne sont en danger, non seulement parce que personne ne les entretient, mais aussi parce que personne ne les visite et ne les utilise dans leur vocation cultuelle: j’ai récemment été alerté d’une visite sauvage en mode « URBEX », des jeunes qui ont exploré une église pour photographier son état d’abandon avancé.
Ma consternation et ma tristesse ne viennent pas seulement de voir ce patrimoine en danger, saccagé ou laissé à l’abandon. Ma sidération vient aussi de ce que les chrétiens sont souvent attachés à des murs qui les rattachent à leurs racines, mais savent laisser en jachère la foi qui leur permettrait de faire de cet édifice un témoignage vivant du patrimoine chrétien, dans la grande histoire de notre pays et de nos familles.
Dans les années à venir : bon nombre d’églises vont s’effondrer ou seront désaffectées au culte parce que la foi dans nos cœurs est devenue accessoire et superficielle. Ouvrir une église, prier à 2 ou 3, proposer de s’y rassembler avec ou sans prêtre, pas seulement pour des événements « culturels » c’est entretenir la flamme de la foi dans nos hameaux et nos quartiers ! Et cela passe aussi par un lieu qui le dise au plus près de nos maisons, dans nos quartiers et nos villages et dans le paysage, jusque haut dans le ciel !