Des mois, des années parfois… Une histoire heureuse, une complicité, des anecdotes, des tranches de vie, des bonheurs et des épreuves surmontées ensemble… Des milliers de SMS, des mots doux, des paroles fortes qui résonnent encore : « Je t’aime, tu es unique, c’est pour la vie ! » Et tout se termine en quelques secondes, quelques minutes, ou par un sms laconique : « c’est fini entre nous. »
Ces jours-ci, j’ai rencontré plusieurs jeunes qui viennent de vivre cette rude épreuve : rupture amoureuse. La sidération, la dépression font parfois place à la colère et à l’incompréhension.
Tout ce que les tendres amoureux ont partagé devient comme balayures insignifiantes…
Face à ces situations douloureuses, parfois destructrices, qui marquent une vie entière, comment réagir, quelle réponse, quelle parole puis-je apporter ?
En tant que prêtre, je ne peux accueillir avec la plus grande délicatesse le cœur qui saigne, qui pleure et qui est brisé. Même si j'avais remarqué l'absence de fondations solides à une relation, je me garde de paroles et de reproches qui ne servent à rien : "Je te l'avais bien dit ! Les paroles et les conseils paraissent bien dérisoires, tant la relation vécue par le couple est inexplicable et respectable en elle-même : j’évite les paroles pour consoler à peu de frais. J’évite les jugements qui vont alimenter rancœur et animosité à l’encontre de celui/ celle qui s’est barré… Je fais raconter les joies et les bonheurs qu’il faut désormais ranger au musée. J’écoute la passion, la tendresse, les projets déçus qui s’expriment simplement… J’entends la colère et l’incompréhension, les pourquoi et les silences qui disent aussi beaucoup. Sans oublier les remises en question qui sont aussi parfois humblement douloureuses.
En tant que prêtre, accompagnateur de ces jeunes en quête d’amour, en quête de vie, je ne peux aussi ne pas être interpellé par la manière de vivre aujourd’hui ces relations si précieuses, si belles, et si fragiles à la fois. Comme si le durable, le pérenne était hors de portée, illusoire et inaccessible. La futilité des raisons de rupture me saute aux yeux : pour un oui, pour un non, on casse, on se casse ! La rapidité avec laquelle le largueur se remet en couple par la suite me questionne aussi : quelle vérité dans les actes et les paroles ? Aucune ! Juste de la sincérité, subjective, éphémère et superficielle !
Au-delà du constat que je fais de ces « modes » affectives qui construisent une humanité blessée, au coeur piétiné, je ne peux que donner un seul conseil : c’est de chercher à nager à contre-courant de ce monde où la facilité a tout compliqué. Aller à contre-courant dans les paroles, dans les bisous. Donner du sens à chaque choses dans la vérité et la conscience des enjeux profonds. Aller à contre-courant dans la chasteté et la gestion d’une sexualité marquée par l’inconscience et la banalité. Aller à contre courant d’un monde qui prétend faciliter, mais qui a tout fragilisé !
Aller à contre sens, c’est chercher à donner un sens. C’est creuser ce qui mérite d’être retenu, conservé et vécu, pour éviter le temps perdu, pour éviter les blessures dont on ne guérit jamais et qui laissent des traces indélébiles dans les cœurs.