A quoi ça ressemble un chrétien qui fait le carême ? A quoi le reconnaît-on ?
Peut-on le distinguer simplement avec cette trace de cendres qu’il porte sur le front en sortant de l’église le premier jour du carême ?
Eh bien, au risque de vous surprendre, je vais vous dire qu’un chrétien qui fait le carême, et même un chrétien qui essaye d’être chrétien, ça ne se voit pas : ça se sent ! Un chrétien digne de ce nom : il sent ! Il ne doit pas sentir la transpiration à force de vouloir tout faire, tout donner, se donner, en s’agitant dans tous les sens ! Il ne doit pas non plus sentir le moisi en s’enfermant dans les sacristies pour des dévotions hors-sol. Il ne doit pas sentir le sapin, en imaginant que le monde est perdu et qu’il vaut mieux attendre l’autre !
Mais de quelle odeur, le chrétien peut-il être porteur ? Vous avez peut-être oublié qu’avant de recevoir les cendres sur votre front, vous avez reçu une onction d’huile parfumée, l’onction du Saint Chrême le jour de votre baptême et le jour de votre confirmation également ! Sur votre front ! Et c’est cela la marque fondamentale, l’empreinte indélébile qui révèle l’ADN et l'identité du chrétien.
La cendre s’envole et reste une trace furtive pendant quelques instants : et c’est tant mieux : c’est sale, inerte et sans intérêt ! Les cendres déposées sur nos fronts ne sont qu’un signe de pénitence et d’appel à la conversion : il faut très vite s’en débarrasser afin de s’habiller de la plus belle des manières, avec le manteau de fête : celui de notre baptême !
Justement, au jour de notre baptême, c’est une onction parfumée qui a marqué, imprégné, pénétré notre corps, qui a marqué le chrétien d’un sceau permanent. Cette huile et ce parfum ont imprimé la vie du baptisé de la force et l’odeur de Dieu pour que la vie chrétienne ne soit pas terne et sale, inerte et furtive comme ces cendres, mais que son agréable parfum se répande et diffuse autour de lui !
Un chrétien qui vit sa foi, qui s’engage sur le chemin du carême, ça ne se voit pas, mais ça doit se sentir à partir du moment où on le voit, où on le regarde, où on l’écoute : « Tiens, celui-ci, celle-là, elle a changé ! Je ne sais pas ce qui lui arrive mais depuis mercredi, ma sœur, elle sourit tout le temps ! Le voisin, d’ordinaire toujours de mauvaise humeur, m’a dit un jovial bonjour ce matin ! Tel autre m’a même proposé son aide pour tailler les branches des arbres dans mon jardin. » Après tout, le carême et un chemin d’espérance (comme le thème du jubilé 2025 nous y invite) où seuls comptent les petits pas de l’amour !
La vie chrétienne ressemble au bifidus actif : ça fait du bien à l’intérieur, et ça se ressent à l’extérieur, ça se devine, ça se dévoile avec bonheur ! Si bien que le carême n’a plus grand-chose à voir avec l’odeur de friture du poisson le vendredi pour remplacer l’entrecôte ostracisée durant 40 jours !
Alors oui, la prière, oui l’aumône, oui le jeûne sont les armes du carême ! Mais elles sont au service de notre transformation intérieure afin que dans tous les pans de notre vie, nous puissions sentir bon l’Evangile. Cet effluve, qui vient de Dieu, est comme une joyeuse et lumineuse bonne nouvelle, offerte à tous les enfants de Dieu, offerte à tous les hommes qui s’approcheront du Ressuscité pour prendre son odeur et en être parfumés !