Chaque semaine, comme prêtre, j’accompagne des familles à l’occasion de la mort d’un proche. Pour la célébration des obsèques, des chrétiens formés à ce ministère de compassion le font aussi avec délicatesse et bienveillance. La plupart des familles qui font une démarche religieuse, surtout pour une personne âgée, mettent en avant les convictions croyantes du défunt, sans forcément adhérer eux même à l’espérance chrétienne : peu de personne font le signe de croix au début des célébrations, pour donner un élément objectif. Au début des obsèques, les hommages rédigés et exprimés par les proches rappellent les qualités, les valeurs humaines ou chrétienne de leur cher disparu. Même pour une grand-mère croyante et qui assumait sa foi chrétienne, rares sont les hommages qui expriment que « Yvonne croyait en Jésus-Christ et espérait en la résurrection ». (Il parait même qu’un pourcentage élevé de chrétiens pratiquants ne croient pas en la résurrection !)
Il semble que si la mort est devenue un tabou, la résurrection le soit devenu encore davantage !
On veut, de toutes ses forces, espérer au-delà de la mort : croire que la mort n’est pas un point final et une absence définitive. Beaucoup expriment donc leur foi en disant « une étoile de plus brille dans le ciel » ou « un ange dans le ciel veille sur nous désormais » ou bien encore, en parlant à la deuxième personne : « Mamie Rose, tu resteras vivante dans nos cœurs à jamais ! » Cela correspond peut-être à une manière de parler contemporaine. Toujours est-il que croire en Dieu sans le nommer, n'est-ce pas un peu comme installer une lampe sans appuyer sur l'interrupteur ?
Parler de Dieu, parler de l’espérance chrétienne fondée sur Jésus resuscité, semble un pas impossible à faire pour la plupart de ceux qui connaissent un deuil, dans la société actuelle française. N’est-ce pas le signe que l'homme contemporain est prétentieux et orgueilleux ? Remettre sa destinée entre les mains d’un autre, de Dieu est-il invraisemblable ?
L’espérance de l’homme du XXI° siècle face à la mort : c'est de penser que les défunts restent vivants "dans leur cœur". Mais que se passe-t-il le jour où leur cœur s'arrête ? Que peut-on espérer et attendre d’une étoile lointaine, qui brillera quelques milliards d’années certes, avant de finir par mourir aussi !?
Croire en un Dieu qui nous aime depuis toujours et pour toujours ne fait plus partie des horizons possibles, des perspectives désirables ! Ou est-ce seulement une pudeur qui empêche de se fier à Dieu pour notre destinée post-mortem ? Il faudrait donc tout ramener à soi pour pouvoir avoir l'impression de maîtriser l'immaîtrisable ?
La mort inéluctable qui nous attend tous, et la résurrection comme perspective ancrée en un Dieu Père « qui ne veut pas qu’un seul de ces petits soit perdu. » (Matthieu 18, 14) nous ouvre de réelles perspectives pour notre existence à condition de croire que bien des choses nous échappent ici-bas, à commencer par notre propre vie : « Celui qui voudra sauver sa vie la perdra ! » (Matthieu 16, 25)