Un jour, tous les jours, depuis des années, de Tibbhirine à Bagdad, de Alep à St Etienne de Rouvray, du Pakistan au Nigéria, des hommes et des femmes, des enfants, parce qu’ils mettent leur foi en Jésus-Christ sont ciblés, torturés, égorgés… Ils ne sont pas les seuls, mais leur foi chrétienne est un motif de persécution supplémentaire évident. Même des musulmans sont des victimes de cette guerre sans ennemi qui se prétend islamique...
Si on m’avait dit un jour que je pourrais, en France être parmi les cibles potentielles, je ne l’aurai pas cru. Mais aujourd’hui, un prêtre, parce que prêtre, a donné sa vie jusqu’au bout de ses 86 ans : il a été égorgé dans une église de France, par des fanatiques aveuglés par une idéologie enrobée de religion. Hier les synagogues, aujourd’hui les symboles de la France, fille ainée de l’Eglise, quoi qu’en pensent les français : la France est perçue comme à la tête de la croisade comme l’Islam par ces débiles mentaux qui rattachent leurs idées à un Coran dépourvu d’exégèse. Le 14 juillet pour sa fête nationale, aujourd’hui dans une église ordinaire dans une ville de province, demain à Lourdes ou à la Tour Eiffel… Des symboles forts qui parlent de la France chrétienne, de la France républicaine… Vu de loin, ce pays qui se targue d’être la « patrie des Droits de l’Homme » a depuis longtemps déserté cet idéal, et renoncé à ses racines. Mais eux, les illuminés du croissant, ils veulent décapiter cette France qui met en avant la « Liberté, l’égalité, la Fraternité » sans défendre aujourd’hui ce que cela signifie dans un monde en mutation sévère, confronté à des évolutions dramatiques, à des migrations préoccupantes, à des crises écologiques ou humanitaires inquiétantes, à des inégalités scandaleuses.
Prêtre, ma vie, je l’ai déjà donnée au Christ. Je suis fier d’être à Lui et de tenter chaque jour de lui ressembler : « Pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. » (Jean 15, 13) Ma vie, je la donne chaque jour à mes frères et sœurs, au moyen de mon sacerdoce, dans les pauvretés et les fragilités de ma personne. Je veux œuvrer pour la paix et la fraternité, sans être naïf face à cette cinquième colonne qui peut frapper partout et n’importe quand. Comme il n’est pas possible de mettre un policier devant chaque église, et que de toute manière, cela ne servirait à rien, j’ose simplement dire à celui qui a en lui la haine de l’Homme, la haine de l’autre, de la haine anonyme contre moi et qui prétend honorer Dieu en bafouant l’homme : tu es un frère humain, même si ta haine, même si tes actes peuvent te rendre aujourd’hui incapable de fraternité. Je prie pour toi, et je fais miens ces mots de Christian de Chergé, moine assassiné en Algérie en 1996 : « S'il m'arrivait un jour - et ça pourrait être aujourd'hui - d'être victime du terrorisme qui semble vouloir englober maintenant tous les étrangers vivant en Algérie, j'aimerais que ma communauté, mon Église, ma famille, se souviennent que ma vie était DONNÉE à Dieu et à ce pays. Qu'ils acceptent que le Maître Unique de toute vie ne saurait être étranger à ce départ brutal. Qu'ils prient pour moi : comment serais-je trouvé digne d'une telle offrande ? Qu'ils sachent associer cette mort à tant d'autres aussi violentes, laissées dans l'indifférence de l'anonymat. »
France, ma France, mon pays, réveille-toi ! Les terroristes veulent te mettre à genoux. Mets-toi à genoux de toi-même pour chercher humblement à convertir tes politiques internationales indignes de ton rang et de ton Histoire. Mets-toi à genoux pour chercher à désamorcer la haine dont tu n’es pas responsable, mais que tu entretiens sans doute par ton arrogance et ta suffisance. Les chemins de la paix passent toujours par un examen de conscience, et par l’humilité nécessaire qui fait grandir en fin de compte.
France, ma France, cherche des chemins audacieux et novateurs pour inventer la paix : appuie-toi sur ton passé glorieux mais invente l’avenir qui fera de toi une étoile lumineuse dans le concert des nations pour ce XXIème siècle !