Voilà une vraie question à laquelle chacun se trouve confronté tôt ou tard. Les évangélistes notent d’ailleurs que Jésus lui-même fit cette douloureuse expérience de la prière non exaucée, puisque sa première demande, au jardin des Oliviers, consistait à prier son Père "d’écarter de lui cette coupe", c’est à dire de lui épargner la souffrance et la mort. Qui d’entre nous n’en a pas voulu au bon Dieu, un jour ou l’autre, d’avoir laissé mourir un parent ou un ami très cher, pour lequel il avait pourtant fait de nombreuses et ferventes prières ? Comme Marthe à la mort de son frère, nous sommes tentés d’adresser à Dieu des reproches : "Si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort..." (Jn 11,21) Mais la foi nous pousse, comme Marthe, à dépasser ce moment de révolte et, comme Jésus, à assortir nos demandes d’une remise confiante de nous-mêmes entre les mains du Père : "Pourtant, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux !" (Mc 14,36)
Il en va de la prière comme du reste : l’amour supporte mal les contraintes. Cela vaut pour Dieu qui quémande notre amitié et notre collaboration sans s’imposer à nous. Cela vaut aussi pour la manière dont nous nous adressons à Lui en lui exprimant nos propres désirs, sans nous croire obligés d’y adjoindre des ultimatums ! Et si, en effet, la prière de demande servait, non pas à informer Dieu de nos besoins, mais à nous donner le temps, sous son regard, de nous ajuster à Lui et, s’il le faut, de convertir nos désirs ? La question mérite au moins d’être posée...