« On n’a pas le cul sorti des ronces ! »
Entre les attaques terroristes et la pandémie du Covid, on pourrait se dire que l’avenir est bien incertain ! Il serait même intéressant de se demander si, une fois de plus, ce confinement va nous aider à réfléchir et à réformer nos pratiques individuelles (ou individualistes) et nos priorités collectives, nos modes de penser et nos idées bien formatées. N’est-ce pas le bon moment de prendre un peu de recul pour réviser nos priorités et nos modes de vie, nos habitudes de consommation, et même nos convictions ?
La dernière encyclique du pape François parle de fraternité. Une valeur chère à notre République française qui l’a inscrite dans sa devise. Depuis l’ignoble assassinat du professeur Samuel Paty le 16 octobre, on a beaucoup parlé et défendu la liberté d’expression. « Il y a des croyants qui pensent que leur grandeur réside dans l'imposition de leurs idéologies aux autres ou dans la défense violente de la vérité ou encore dans de grandes manifestations de force. Nous, croyants, nous devons tous le reconnaître : l'amour passe en premier ; ce qui ne doit jamais être mis en danger, c'est l'amour ; le plus grand danger c'est de ne pas aimer. » (Encyclique Fratelli tutti § 92) Le pape François nous rappelle qu’au-dessus du droit inaliénable à la liberté, celle qu’on veut imposer ou juste proposer, il existe un devoir de fraternité.
Est-ce fraternel de se moquer ? Est-ce fraternel d’outrager ? Est-ce fraternel de piétiner les valeurs des autres, même pour rigoler ? Dans un autre registre : est-ce fraternel de se dispenser de masque dans un lieu public ? Aucun comportement désinvolte ne favorise la compréhension et l’amitié sociale. Aucune moquerie, ni aucun blasphème ne peut justifier la violence et la haine, mais est-ce qu’elles ne s’expliquent pas par un sentiment d’humiliation éprouvé par certaines personnes, fussent-elles tordues ou fanatiques ?
Une société sans fraternité se condamne à la violence et à la haine. Refuser d’entendre que la liberté individuelle puisse toucher et détruire l’âme de son frère, de son voisin, ou même de son ennemi, c’est prendre le risque d’exacerber les rancœurs et les délires mystiques des fanatiques ou des gens simples qui refusent l’humour outrancier.
On ne pourra pas sortir grandis des épreuves que nous traversons si on crucifie la fraternité sur l’autel de la liberté. Et comme le dit si bien Mohammed MOUSSAOUI, président du Conseil Français du Culte Musulman : « Notre attachement à la liberté d’expression doit sans cesse rechercher l’esprit de fraternité. »
Xavier Cormary, prêtre en Ségala